Cindy Dumais
5 Dialogues
Du 5 septembre au 12 octobre 2019
Vernissage le jeudi 5 septembre dès 17 h 30
Dans 5 dialogues, Cindy Dumais poursuit des recherches sur l’art et ses références, en utilisant la lecture comme moteur pour examiner l’origine des idées, de la pensée et l’identité fondamentale. Mettant en relation ses propres questionnements et pistes de réflexion avec le contenu théorique de ses lectures, l’artiste bâtit un dialogue qui passe alternativement de l’auteur au lecteur, mettant en doute le rôle passif du destinataire. À partir de ce matériau textuel se déploient des œuvres dont les formes répondent aux documents dont elles tirent leurs sources, créant un intertexte qui dépasse les limites spécifiques des deux disciplines que sont la littérature et les arts visuels.
En effet, les œuvres de Dumais se situent à la limite de l’intertexte et de l’hypertexte, faisant parfois usage de la citation et du rapport direct à la source, ou alors transformant les extraits choisis par ses annotations, ratures et erreurs, qui marquent le développement de son discours intérieur. Par cela, l’artiste revendique la posture du lecteur comme auteur, participant par sa connaissance littéraire, son expérience empirique ou même son imagination, à enrichir, bonifier et transformer l’œuvre d’un autre1. Mais puisque Dumais n’est pas seulement lectrice, mais artiste, elle affirme également une attitude concomitante : l’artiste comme auteur, une position qui trouve sa genèse dans l’art conceptuel et dans l’intérêt que ce courant a porté au langage et au discours théorique. En déplaçant leur activité artistique de la production matérielle, axée sur la forme, vers une production discursive, la première vague d’artistes conceptuels a contribué dès les années 1960 à faire entrer dans le champ des arts visuels non seulement leurs propres écrits, mais aussi des références philosophiques (Wittgenstein, Merleau-Ponty, etc.) ou littéraires (Borges, Mallarmé, etc.). Ainsi, l’axiome qui sous-tend la pratique de Dumais, soit que la lecture ou le rapport au texte contiennent le potentiel d’une nouvelle œuvre, s’inscrit dans la lignée des stratégies conceptuelles qui ont fortement nourri l’art contemporain depuis leur avènement.
Si le texte imprimé, très typique de l’esthétique conceptuelle, occupe une place prépondérante dans les 5 dialogues, une variété de matériaux sont aussi utilisés pour leurs propriétés spécifiques : le papier carbone, le fac-similé et le miroir mettent en exergue la tension entre l’authenticité et la copie, sur laquelle se fondent les théories de la transtextualité. En effet, le rapport entre soi et l’autre, entre ses propres pensées et celles des autres, est nécessaire à tout dialogue : se voir dans l’œuvre confronte le spectateur à son propre apport dans cette discussion qui évolue sans cesse dès l’ajout d’un nouveau locuteur. L’usage de la broderie, pratiquée par l’artiste elle-même, est notable en ce qu’elle introduit un autre type de discours : celui de la subjectivité assumée, supposée par la main de l’artiste. Il semble que ce soit par cet acte plus intime, qui évoque le labeur du travail et le temps de réflexion que sa nature processuelle implique, que l’artiste pose le sceau de son autorité auctoriale. Dans un matériau traditionnellement plus près des arts plastiques, le texte se livre réellement comme une transformation, une transposition hors de son contexte d’origine, qui fait de nouveau œuvre.
1 Sur le rôle du lecteur, voir Sophie Rabau, L’intertextualité, Flammarion, Paris, 2002.
Marie-Pier Bocquet
Coordonnatrice à la programmation
Cindy Dumais vit à Chicoutimi où elle poursuit ses recherches en arts visuels et en écriture. Elle s’intéresse à la dimension littéraire des arts visuels; elle cherche à transposer, traduire, sublimer l’écrit dans l’espace et dans les images, de façon à créer une constellation formelle et iconographique. Elle a présenté près d’une dizaine d’expositions solos et a participé à une quarantaine d’expositions collectives au Canada, en Suède, en Finlande, à Cuba, en Allemagne et en Grèce. Plus d’une cinquantaine d’œuvres font partie de collections privées et publiques, dont la collection Prêt d’œuvres d’art du MNBAQ, la Collection UQAC et la Collection Loto-Québec. Son travail multidisciplinaire est soutenu par Ville de Saguenay, le Conseil des arts et des lettres du Québec et le Conseil des Arts du Canada.
L'artiste remercie le Conseil des arts et des lettres du Québec, la Fondation TIMI et Touttout, centre de production en art actuel
Crédit photo : Jean-Michaël Seminaro
Mots-clés: Exposition,, Arts visuels,, Belgo,